Faire attention aux "Ah non ça, jamais!"

Faire attention aux “Ah non ça, jamais!”

Faire attention aux “Ah non ça, jamais!” 1200 628 La vie en plus simple | Mélanie Blanc

Je ne sais pas si vous vous êtes déjà dit que, telle chose, c’est sûr, c’est pas votre truc. Que ça, en tous cas, vous ne le ferez jamais. Que c’est tellement pas vous!

Moi, ça m’est arrivé il y a quelques semaines. Je parlais avec une amie et elle me dit qu’elle m’imagine bien prof. Moi, PROF?!!!????!!! Je me demandais bien d’où ça pouvait sortir parce que, s’il y a vraiment un métier qui ne m’a jamais dit, c’est bien celui-ci.

Depuis, j’y repense régulièrement. Notamment parce que je suis tombée sur plusieurs articles dans lesquels des gens expliquaient qu’ils s’éclataient en faisant quelque chose qu’ils s’étaient pourtant promis de ne jamais faire.

C’est l’écrivaine Tatiana de Rosnay qui promettait, en mars 2020, dans les pages de Paris Match que Le jour où j’écrirai un feel-good book, c’est que l’on aura trafiqué mon cerveau.

(Toutes les passages cités en italique viennent de cet article paru dans Paris Match en mai 2021.)

Puis la pandémie arrive. Elle retombe sur un manuscrit confiné depuis trente ans dans un carton, portant la mention explicite: “Ne pas publier si je meurs.”

Son éditeur l’avait refusé. Dépitée, Tatiana de Rosnay bannit Célestine à la cave et se convainc que le genre “joyeux” n’est pas pour elle.

Elle est donc partie en sens inverse. Je suis partie dans le noir. L’infidélité, les trahisons, les accidents ont été ma marque de fabrique.

Pour finir par revenir à plus de légèreté un peu par “hasard”.

C’est aussi l’histoire d’Anne Sinclair qui s’était promise de ne jamais publier ses mémoires. Elle considérait les mémoires de journalistes comme un exercice “ridicule” et “narcissique”. La crise du Covid est passée par là, propice à l’introspection, et Anne Sinclair reconnaît avec humour s’être complètement reniée sur ce point. (24 heures, 1er juin 2021.)

Résutat: elle publie ses mémoires début juin 2021.

Ou c’est encore l’histoire du chef Yves Camdeborde qui avait en horreur la bistronomie. S’il avait su… 😉

Dans l’édition du Journal du Dimanche du 30 mai 2021, voici ce qu’il raconte:

Quand j’ai monté La Régalade, avec toute la rigueur des tables étoilées mais avec une ambiance d’auberge et des prix abordables, Seb (Sébastien Demorand, un critique gastronomique) m’a dit: “Tu fais de la bistronomie!” J’étais profondément vexé, je ne lui ai pas parlé pendant quinze jours! Je sortais du Ritz et du Crillon et pour moi, homme de comptoir du Sud-Ouest, le bistrot, c’était le coude sur le bar, le saucisson et des canons: tout sauf de la gastronomie! J’ai mis longtemps à comprendre que j’étais en train de trouver ma voie, en cassant les codes du restaurant, qui était devenu un “musée”.

3 exemples qui montrent que, quand on dit que “Ah ça non, jamais!”, on tente souvent de ne pas exposer la partie de nous qui nous représente pourtant le mieux. Alors, on tourne un peu autour du pot. Et, un jour, un “hasard” de la vie permet de mettre cette partie en pleine lumière.

Parce que se révéler demande du courage et nécessite donc parfois un petit coup de pouce de l’univers.

Je ne sais pas si je serai prof un jour mais, au lieu de lancer des gros “Ah non ça, en tous cas, jamais!”, je préfère désormais sourire quand l’envie de crier ces mots se manifeste et laisser quelques points de suspension…

Parce qu’au lieu d’une porte qui se ferme, ça peut être une clé qui nous est présentée.

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